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Point macroéconomique

Cette récession qui hante les marchés financiers

Par 27 mai 2022mai 30th, 2022No Comments

Le mot n’est plus tabou. Au forum économique de Davos, qui se tient cette année exceptionnellement en mai à cause de la vague Omicron de janvier dernier, la grande majorité des économistes rejette l’hypothèse d’une récession imminente, sans l’écarter d’ici fin 2023. Les sujets de discussion se sont portés sur les trois « R » en Anglais : Récession, Russie et Rates (taux), sans oublier la décarbonisation de l’économie, qui devient un défi majeur à relever au cours de cette décennie.

 

Quels que soient les débats des grands de ce monde, les derniers chiffres économiques ont été franchement décevants et militent actuellement pour un sérieux ralentissement à court-terme, surtout aux États-Unis : les indicateurs PMI de mai, les commandes de biens durables, les ventes de logements neufs et anciens ont été en baisse en avril et nettement inférieurs aux attentes. Parmi certaines données locales, l’indice manufacturier de la FED de Richemont est ressorti négatif à -9 en mai, soit le niveau le plus faible depuis mai 2020, contre +14 en avril. Le marché n’a pas attendu davantage pour changer de cap avec des taux orientés à la baisse, malgré des banques centrales au discours musclé. L’idée étant que la FED n’irait pas jusqu’au bout de son durcissement monétaire et serait contrainte de faire une pause après sa réunion de juillet. Il en résulte une nette baisse du taux à 2 ans américain, désormais à 2,46% contre un plus haut à 2,85% début mai. Ce mouvement entraîne mécaniquement une légère pentification de la courbe, car le repli est moins marqué sur l’échéance à 10 ans qui se négocie à 2,75%. Les opérateurs pensent également que le pic d’inflation est passé outre-Atlantique, puisque les anticipations d’inflation à 2 ans se sont nettement repliées à 3,88% à 2 ans contre presque 5% fin mars.

« Bad news is good news? » Ce vieil adage, contre-intuitif pour la plupart d’entre nous, a encore fonctionné, puisque les marchés financiers ont vécu plusieurs séances de hausse, après avoir touché le 20 mai un plus bas annuel en séance sur le Nasdaq. Ce rebond est certes technique, aidé par une repondération des portefeuilles des fonds de pension et diversifiés: la baisse marquée de certains actifs a déclenché une vague d’achats sur les actions pour respecter les objectif d’allocation fixés initialement.

Avec la récente baisse des taux, ce sont naturellement les belles valeurs de croissance qui ont bénéficié de ce processus d’arbitrage. Ainsi Microsoft s’adjuge plus de 5% de hausse sur la semaine. Les optimistes, qui ne croient pas à la récession malgré le choc inflationniste, évoquent la bonne tenue de la consommation. Celle-ci a été révisée à la hausse au premier trimestre à 3,1% contre 2,7% selon les premières estimations. Il est vrai que le comportement des consommateurs a changé de façon drastique et devient de plus en plus difficile à prédire. Les compagnies aériennes en font l’amer expérience. Comble de l’absurde: après deux années de vaches maigres, où elles ont poursuivi une politique de réduction de leurs capacités, elles se voient contraintes, d’annuler des vols à cause d’une demande trop forte. Le personnel navigant, de sécurité au sol et les capacités informatiques sont insuffisants pour honorer une ruée vers les aéroports et les voyages. On se dirige vers une des plus belles saisons touristiques de ces dernière années, à l’opposé d’une récession envisagée chez certains acteurs et malgré cette ambiance pesante sur les marchés. Reconnaissons qu’on a jamais vu une récession dans les pays développés, avec un taux de chômage aussi bas comme actuellement. La demande dispose encore de ressources, même si il est plus difficile de joindre les deux bouts au quotidien pour beaucoup de ménages.